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* CHEMIN SCABREUX

 "Le chemin est un peu scabreux

    quoiqu'il paraisse assez beau" 

                                        Voltaire 

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Publié par VERICUETOS

Les Portes de l’ Aube d'Orlando Jimeno Grendi

                           Art et vie sexuelle naîssent du même cep.

                                                   Cesare  Pavese.

                  

 Il faut  faire l’amour à la lisière du monde

( en écoutant aux portes )

libidinaux et cérémonieux à l’intérieur de l’oeil,

judas subtil, unique porte qui donne sur l’enfer:

Tabula rasa , ras de marée au ras du ciel et du sol rasons

   les paradis obligatoires,

deux mondes au milieu de ce monde

un autre monde à même dans ce monde

il n’ y a pas d’autre monde

                      monde immonde  (Mondo Cane )

Le monde est  

                      Ni plus ni moins

Ses yeux dans les gonds de la mer se dévergondent au bout de l’amour

Valparaiso !

 

La porte s’ouvre sur le port:  j’adviens.

Je dis, je me contradis, je ne me dédis pas.

Poète tu te contredis si tu dis le monde est ainsi.

Mer en rut et tout l’azur, un autre monde dans ce monde.

La poésie mutine se mésure mutable et nous émeut

 

(Femina semper mutabile. Virgilio dixit )

 

Mes pas s’arrêtent: résonances mentales;

je m’éloigne de cette minute, ma voix me suit,

mon corps quitte cet hémisphère,

du même endroit à nulle part,

je vais à mon prochain passé, temps distinct, distant,

incessant dans sa perfection immobile

inquiet dans son éternel rétour, présumé présent,

impatiente toute forme se déforme autour

retournent temps et mer , ils disparaîssent sans contour.

De ses yeux reviennent le sel et le crépuscule marin

le vent de profile hésite dans l’instant parfait.

 

Il faut faire l’amour contre l’évidence du désastre

     jusqu’ à creuser dans l’os intacte le chien rongé par la terre

 

Il faut faire l’amour mutinés dans l’unique vague qui s’écroule

     sous l’epiderme de l’océane

 

Il faut faire l’amour contre la rapacité de l’oubli:

     dans l’espace imprévu de l’aimant

     dans le vide qui laisse la lumière de ton corps vu,

     vue  vaste

c’est l’amour et non pas la mort qui nous devêt

et nous dévaste:

      la vie ne suffit pas,

      l’homme n’a que sa mémoire comme unique témoin.

 

Il faut faire l’amour avec la fleur violette que Goldmund approche à l’oeil:

      examiner le calice étroit, veines et organes minuscules,

      duvet du nouveau-né, pudeur intime de vierge

disposition ordonée du delicat feuillage autour de la tige:

comment ne pas  enamourer une fleur pareille ?

Lui dire:  un vers de Virgile n’a pas la subtilité de ta spirale.

 

On le sait;

                   serrer un corps dans les lèvres de la côte ultime

là où l’enigme de la mer est plus exacte que le nombre de la mort,

là l’évidence de l’instant nous délivre de la vie éternelle

                   dans l’eternelle vivacité;

de l’ascèse à la jouissance, du dépouillement à la luxure;

                    à d’autres l’ordre et la mésure

la mémoire libertaire nous libère;

prodigue de mer et métamorphose et matière maternelle

tu ouvres la paupière du sexe, pépinière prodigue

étendue disperse en flammes sous le poids des corps,

tu franchis le royaume millénaire du désir.

Entends-tu la mer et ses embruns des yeux profus ?

Elle chante les noces de l’acte et la gestation

Elle  exerce son métier humain; délivrer la terre de son naufrage:

les dieux retournerons au limon d’où ils vinrent,

ils danseront chaussés de pollen doré,

souriant par leur bouche de sexe  sans rides,

amphithéâtre sans épitaphes où les Moïras accordent leur Diké

E ros fils de Penia  et  Poros  

    tendre tyran splendide,

    prisonnier perpétuel persiste

dans le goût animal de la mort:

    son apprentissage nous rend à la vie.

C’est Venus dans le pourrissoire qui nous caresse entre la prophésie

    et l’éclair

C’est Eve prophane, maîtresse mère de la mort et la matière,

    fusion et effusion de l’intellect et le sang,

confusion de l’abstrait et du concret, double face de l’oeuvre d’art

     libératrice de l’esprit immolé dans le corps.

Poète

         

         prisonnier primitif

E ros  en exaltant la vie affirme l’art plus que le destin;

au cadran rongeur il oppose le fugace empire de l’impropre,

il  improvise dans la sepulture de la forme prévue

l’impérieuse réponse de la précision.

 

Il faut faire l’amour au creux de la vague mugissant avec le cristal

         de la mer

          des ventouses incessantes visent nos origines sans cessure ni censure,

corps dispersés dans le mutisme des reflets.

 

Nous sommes

image, histoire, événement, évidence;

          animal  sacré

l’homme survit à la lueur d’un geranium ou dans l’apocalypse d’une syllabe.

 

Il  f aut faire l’amour audacieux dans la main brève de la mort,

bergère  leste, musique automnale, lampe minuscule,

mère intime, aimante momentanée,

rose subtile sous toutes les paupières,

prendre le pas, une voix une autre fois, écho sans voix,

les reflets d’un corps passent et ne pèsent pas,

personne n’apparaît sans périr ce qui paraît.

Etre et paraître. Sans enigme, point d’Art.

 

Il faut faire l’amour dans un jardin des dagues suspendues;

         syllabes dans le sable,

         festin des reflets

feuillages en flammes,

couper le cordon umbilicale

(crime du poète moderne ) est impossible;

nous renaîssons dans le vagin maternel.

Pugnacité des corps, nous voyant nous aller avec eux.

La parole prophétise dans les parages  déserts.

L’heure verticale ouvre ses lèvres de salpêtre nocturne,

              se precipite depuis les yeux

vers la mer qui lave ses glaives blonds.

Syllabe lente et nue tu sombres dans mon front,

              houle des corps

conjugués dans la jonglerie du langage

              adolescente  infinie

E ros érode, entre la groupe et les testicules, l’image du monde.

Dans un autre hémisphère les moulins passent, le vent demeure;

              tes pas sont mes pensées:

temps mortel, végétation de sons, la vraie vie est imaginaire.

 

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